Après Martin Grandjean, candidat socialiste, conseiller communal et président du PS Leysin, et son analyse des enjeux pour le district d’Aigle («#VD2012 : Le centre hors-jeu dans le district d’Aigle?») et mon article concernant la Riviera («#VD2012 : Qui seront les déçus sur la Riviera ?»), Benoît Gaillard, secrétaire du Parti socialiste lausannois, nous livre son analyse de la situation concernant le district de Lausannne. Merci à lui et bonne lecture.
A propos des élections cantonales 2012, public et médias tendent à concentrer leur attention sur les tendance générales concernant le Conseil d’Etat. Cependant, la composition du Grand Conseil sera bien évidemment décisive pour la prochaine législature.
Dans ce cadre, je m’intéresserai, après les analyses sur la Riviera et le Chablais faites précédemment ici, à la situation à Lausanne. Lausanne fait partie de l’arrondissement subdivisé du même nom. Les communes de la Couronne lausannoise élisent 5 députés. Pour la ville elle-même, qui nous occupera exclusivement ici, 27 sièges sont à disposition.
Résultats des élections précédentes
Les 6 élections précédentes offrent une première vision de la répartition des forces dans la commune. On le sait, le bloc de gauche est majoritaire depuis deux décennies environ à Lausanne.
Graphique 1 : résultats
Ce que les courbes de ce graphique permettent de voir, c’est que tous les partis ne varient pas de la même façon selon les échéances électorales. Certains partis réalisent toujours à peu près le même score, alors que pour d’autres, celui-ci varie fortement. L’écart-type est un outil mathématique qui permet d’approcher la façon dont les différents résultats s’écartent de la moyenne, et donc la variation par rapport au score moyen. Dans notre cas, le PS se distingue par une stabilité assez marquée, puisque son écart-type n’est que de 2 points, la moyenne de ses scores étant de 28.10% sur les six derniers cycles électoraux. En revanche, cet écart est deux fois plus élevé, à 4 points, pour l’UDC, ainsi que pour le PLR.
Ainsi, lors des dernières élections cantonales, en 2007, l’UDC ne dépassait pas 10%, alors qu’elle arrivait à près de 17% lors des fédérales de 2007 et 2011. Il ne s’agit donc pas d’une simple variation dans le temps, mais bien d’un vote structuré différemment en fonction de l’échelon concerné.
Graphique 2 : poids des différents scrutins
Ce graphique permet de se représenter, sur la dernière élection de chaque niveau, les scores relatifs des différents partis. Alors que le PS a clairement la barre dont les trois parties sont les plus équilibrées, l’UDC, sans surprise réalise de meilleurs scores lors des élections fédérales que lors des élections communales, par exemple. Ceci vaut également pour les partis du centre, qui profitent probablement, d’une part, de l’absence de quorum (pour autant que celui-ci soit réellement pris en compte par l’électorat, ce qui reste à prouver), mais aussi de la plus grande visibilité nationale que vaudoise du PDC, ainsi que des Verts libéraux.
Ces chiffres permettent également de rappeler que Lausanne, dont la majorité est à gauche depuis plus de vingt ans, n’est pas un bastion définitivement acquis pour elle. En 2006 et 2007, lors des élections communales, cantonales et fédérales, la gauche dans son ensemble se situait entre 58% et 65% des suffrages. Depuis, son assise a visiblement diminué, puisqu’elle s’établit, lors des communales et des fédérales de 2011, juste au-dessus de 55%. Disons que Lausanne-la-Rouge pâlit légèrement… ou, plus précisément, que les résultats communaux semblent montrer qu’alors que certains électeurs délaissent l’extrême gauche au profit d’un PS à la ligne passablement marquée, les Verts faiblissent, eux, surtout au profit du centre – certains de leurs électeurs étant probablement tentés par les Verts libéraux, qui engrangent 4% des suffrages au printemps 2011, puis 5% en automne.
Perspectives pour les 32 sièges du district
La grande nouveauté en 2012 est constituée par la présence d’une liste du centre susceptible de passer le quorum raté en 2007, et donc d’emporter quasi-automatiquement deux sièges de députés. Les listes du MCVD et du Parti pirate, elles, n’ont que de très maigres chances de dépasser 1 à 2%.
Le tableau ci-dessus présente plusieurs possibilités pour la répartition finale des sièges (les pourcentages sur lesquels se base le calcul sont disponibles sur demande). Après la première ligne qui montre la situation actuelle, la deuxième est une simulation à partir de la répartition des suffrages dans le district lors des dernières élections fédérales. La baisse générale à gauche, évoquée ci-dessus, est manifeste, puisque celle-ci perdrait trois sièges sur 20, tous à Lausanne.
La ligne du dessous représente le résultat avec un vote similaire à celui des élections communales de 2011 dans le sous-arrondissement de Lausanne-Ville, en reprenant le score des fédérales pour le sous-arrondissement de Romanel (qui comprend Romanel, Cheseaux, Jouxtens, le Mont et Epalinges, et où la présence de listes hors parti et d’entente ainsi que de communes élisant leur conseil à la majoritaire rend l’extraction de chiffres très difficile). La perte de sièges est nette à gauche, et touche cette fois le PS, qui perdrait l’un de ses députés lausannois. La rangée suivante représente le résultat obtenu en prenant, pour Lausanne-Ville, la moyenne arithmétique des pourcentages des partis sur les six dernières élections, et toujours le résultat des fédérales de 2011 pour l’autre partie du district.
Dans tous les cas, le calcul est favorable au « centre », qui est en fait un centre droit, puisque celui-ci semble destiné à dépasser le quorum et donc, mécaniquement, à prendre des sièges aux autres listes.
L’un des scénarios les plus intéressants est probablement celui de l’avant-dernière rangée, qui tente de refléter les tendances en cours dans l’électorat tout en considérant par hypothèse que le comportement électoral varie selon l’échelon institutionnel concerné, mais selon des lignes directrices similaires. Pour ce calcul, on a repris les scores des dernières élections cantonales générales de 2007 en les augmentant de la variation constatée sur les élections fédérales qui ont eu lieu six mois après en 2007 et six mois avant en 2012. Seule correction : 1.4 points ont été ajoutés au score des « divers centre » dans la commune de Lausanne, qui ont été retranchés au PLR, afin de simuler un passage de quorum pour toutes les listes du tableau – fort probable au demeurant, on l’aura compris. Dans ce scénario, les perspectives restent sombres pour la gauche, puisque c’est elle qui se fait dérober deux sièges – le PS, toutefois, n’est pas touché.
Enfin, je propose, dans la dernière rangée, un scénario pour lequel j’ai librement adapté les pourcentages en fonction de ce qui me semble se passer dans la campagne et qui n’est pas pris en compte par les modes de calcul des lignes précédentes. Le seul effet sur les sièges est de rééquilibrer en direction de l’UDC, qui chipe un siège au PLR.
Conclusion : une gauche qui plafonne ?
Lors ders dernières élections cantonales, la perte de 3 points au centre en raison du quorum avait favorisé la gauche, et singulièrement le PS. En 2012, la présence d’une liste plus forte et surtout unitaire du centre devrait permettre le passage du quorum dans l’arrondissement. Si cette hypothèse s’avère fondée, alors c’est très certainement à gauche que seront pris les deux « premier » sièges, ceux qu’engendre automatiquement un score supérieur à 5%.
Relevons les tendances communes aux différents scénarios présentés ci-dessus. Celles-ci sont au nombre de trois :
- Perte d’un siège chez les Verts, dont les sept sièges reposaient sur un score nettement supérieur à 20%, alors qu’ils se situaient entre 15 et 18% lors des deux cycles des 2011.
- Passage du quorum pour le centre, avec un nombre de sièges variables suivant que le potentiel révélé aux fédérales se réalise pleinement ou non.
- Au minimum, rééquilibrage au sein de la droite, avec transfert d’au moins un siège du PLR vers l’UDC.
En présence d’un centre fort et d’une droite qui se rééquilibre à l’interne sans s’effondrer, il semble donc devenir difficile pour le district de Lausanne de devenir le lieu de gains de sièges pour la gauche… malheureusement ! En revanche, on peut bien évidemment compter sur le district pour soutenir massivement la liste commune PS et Verts au Conseil d’Etat, comme il l’a fait pour Luc Recordon et Géraldine Savary lors de la dernière élection majoritaire, en leur accordant 52 et 53% au premier tour, puis 62 et 65% au second.
Benoît Gaillard
Secrétaire du Parti socialiste lausannois
Conseiller communal
www.ps-lausanne.ch
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