La situation de la police cantonale vaudoise devient chaque jour un peu plus ubuesque. Le dernier épisode en date voit la conseillère d’Etat, Jacqueline de Quattro dire mardi à la presse qu’elle en a «marre» (dixit) des dissensions entre Eric Lehmann, chef de la police, et Alain Bergonzoli, chef de la gendarmerie, qu’elle les somme de s’entendre et qu’une délégation du Conseil d’Etat va auditionner les différentes personnes avant de prendre d’éventuelles sanctions.
Ubuesque et inquiétant parce que la politique du département de la sécurité semble se faire en fonction non seulement d’articles publiés par les médias, mais sur les bruits de couloir recueillis par ces médias. Le bruit de couloir subit ainsi une double transformation en accédant immédiatement au statut d’article de presse et de fait établi ce qui, de plus, semble suffire en lui-même pour déclencher une enquête administrative quasiment réalisée sous les yeux du public, dans une nouvelle déclinaison des «reality shows».
Ubuesque parce que dans les premiers rôles la parole est essentiellement donnée aux représentants des syndicats de policiers dont les propos sont cités sans que ces derniers ne fassent véritablement l’objet d’une mise en perspective de la part de journalistes, transformés en officine de communication pour les syndicats de gendarmes.
Ubuesque et «lessivant» parce que le Conseil d’Etat choisit de laver son linge sale en public, les médias se substituant aux relais institutionnels que sont le parlement ou la commission de gestion du Grand Conseil.
Ubuesque et dangereux parce que le comportement de ces garants de l’Etat de droit que sont les gendarmes est fort proche de la sédition et que personne ne semble s’en émouvoir.
Ubuesque et démissionnaire parce que la situation et le conflit existant entre les commandants Lehmann et Bergonzoli sont largement dus aux choix politiques opérés en leur temps par le Conseil d’Etat. Place donc à la recherche du bouc-émissaire plutôt qu’à l’analyse politique et structurelle de cette situation.
Plus inquiétante qu’ubuesque, en définitive, la communication réalisée ce mardi par le Conseil d’Etat s’apparente à un lynchage par anticipation de l’un ou l’autre —voire les deux (?)— des protagonistes.
Dangereux aussi parce que le scénario actuel ressemble furieusement à celui connu du côté de la police cantonale genevoise durant les années Ramseyer et Spoerri où les policiers cantonaux voulaient faire leur propre loi et n’être soumis qu’à eux-mêmes, oscillant entre autogestion incidente et arbitraire «légal».
Nouveau billet: Bonnemine et Ubu à la police cantonale vaudoise http://tinyurl.com/4tapna
@francoismonney 😀 j’avais déjà utilisé Bonnemine dans un article de politis: http://tinyurl.com/4tapna avec image de circonstance…