Rien ne vaut un extrait du billet pour poser le décor :
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Sous nos latitudes, les préliminaires se font à coups de lattes dans les dents, histoire de flinguer les candidates potentielles. Socialistes et Verts se sont ainsi arrangés parmi pour balancer V. Pürro et F. Bugnon hors des listes, laissant un boulevard à Messieurs Hiller, Cramer, Moutinot et Beer. Une majorité de gauche au Conseil d’Etat genevois sans femmes est sortie des urnes. Il fallait y penser, la gauche l’a fait.
Dans ce cas précis, difficile de ne pas lui donner raison. L’épuration des femmes de gauche a bien eu lieu lors des opérations de désignation des candidats. La pré-campagne quoi.
Certains se sont justifiés, par exemple, relativement à Véronique Pürro comme quoi elle serait trop ambitieuse. Comme si ses colistiers éventuels ne l’avaient pas été eux aussi ! La concernant, j’ai un petit doute sur ces motivations réelles lors de cette pré-campagne. A mon avis, devant la situation, elle a surtout joué à se rendre incontournable dans quatre ans. C’est habile, mais cela met aussi en évidence le peu de chance qu’une femme avait de figurer sur la liste socialiste en 2005 pour les élections au Conseil d’Etat genevois.
Pour Madame Bugnon, rien ne lui a été épargné en fonction des vieux clichés qui veulent qu’une femme devra en montrer deux fois plus qu’un homme pour figurer sur une liste. Serait-ce écologiste.
Pour Neuchâtel, le taux de poids lourds fédéraux au mètre carré à gauche, désireux de se rappatrier au Château cantonal, était le plus élevé —je pense— que la Suisse ait connu. Plus un élu rempilant et une élue se retirant. Déjà que le haut du canton a compté un mort de gauche à l’issue du premier tour…
Et si j’ajoute que Jean Studer avait déjà fait don de son corps de mâle prétendant au Conseil fédéral en faveur de Micheline Calmy-Rey, il est facile de comprendre qu’il n’était nullement prêt à se laisser couper un seul poil de sa moustache ou à se faire épiler les sourcils.
Observons maintenant les élections des municipalités vaudoises. Le constat de politique.bleublog se répète-t-il? Pour un petit tour d’horizon, prenons le journal Le Courrier qui présente la composition des municipalités de Lausanne, Nyon, Morges, Renens, Pully, Vevey, Montreux et Yverdon.
Pour Lausanne, le constat est clair : la gauche ne présentait au deuxième tour aucune femme dans les nouveaux candidats; la seule nouvelle candidate féminine (POP) laissant (?) sa place à Marc Vuilleumier. Deux femmes de droite restent sur le carreau, une par tour; c’est le résultat de la déliquescence de la droite lausannoise et ce sont les femmes qui trinquent en première ligne.
A Morges, une seule femme à la municipalité, c’est une ancienne et une socialiste : Nuria Goritte. Le nouvel élu socialiste étant un homme (seul candidat nouveau à gauche).
A Pully, la seule municipale est libérale. Un élu écologiste supplémentaire, mâle même s’il s’appelle Maire.
A Vevey, la majorité passe à gauche, mais aucune femme chez les socialistes veveysans (c’est une habitude). La seule femme à l’exécutif, comme toutes ces dernières législatures, est la libérale Madeleine Burnier; on ose imaginer ce qui se passera dans 5 ans lorsqu’elle ne se représentera pas.
A Montreux, une femme fait son entrée à l’exécutif après des années de vache maigre; elle est libérale.
A Yverdon, si une femme socialiste est élue (Nathalie Saugy, nouvelle candidate), Hélène Grand-Greub (POP) est éjectée par un vert (Cédric Pillonel).
A ce stade, le bilan est proche de l’hécatombe pour les femmes de gauche. Parmi les tueurs de femmes de gauche, les Verts figurent en bonne place. Ne serait-ce que parce qu’ils proposent rarement une femme à l’exécutif… il est donc difficile de les faire élire.
Seule exception avec Renens, dans tous les sens du terme, puisque deux nouvelles candidates de gauche sont élues et rejoignent Marianne Huguenin. Il s’agit de Tinetta Maystre (Verts, enfin!) et Myriam Romano-Malagrifa (PS). En plus, elles figurent dans les quatre premières places.
Enfin, à Nyon, trois femmes à l’exécutif sur 7 municipaux. Deux de gauche dont une nouvelle candidate élue (Fabienne Freymond Cantone, PS).
Le constat est donc rude pour la gauche vaudoise relativement à la promotion féminine. A droite, ce sont les libéraux qui tirent seuls leur épingle du jeu avec des municipales à Nyon, Montreux, Vevey, Pully.
La femme est-elle l’avenir des Libéraux ou masque-t-elle le déclin inexorable du parti ?
Les socialistes disposent eux de 6 municipales dans les 8 communes analysées. Les Verts d’une seule; de même que le POP.
Quelles explications peut-on avancer à cette situation guère reluisante pour les femmes en général et les partis de gauche en particulier ?
J’ébaucherai quelques pistes personnelles qui mériteront d’être débattues :
1° Pour disposer de candidates à l’exécutif, il faut déjà que les listes pour le conseil communal en présentent en grand nombre de telle sorte qu’une ou deux législature plus tard elles puissent se présenter à la municipalité. Or, le recrutement de candidates pour le conseil communal marque largement le pas.
Expérience faite cette année pour ma commune, elles ont très largement plus de retenues à se présenter et il vaut mieux que ce soit des femmes qui prennent en charge leur venue sur une liste. C’est déjà un peu le serpent qui se mord la queue : peu de femmes dans les rangs des conseils communaux qui doivent faire des efforts particuliers de recrutement pour de nouvelles candidates féminines.
Ajoutons qu’au niveau communal, l’instauration d’une politique des quotas serait une catastrophe devant la difficulté générale à recruter des candidat-e-s. Contrairement à Genève, le nombre de conseillers communaux (législatif) est très élevé entre 60 et 100.
2° Sans nul doute possible, nous sommes en présence d’un creux générationnel marqué chez les femmes en politique. La génération ayant conquis de haute lutte leurs droits politiques et leurs fllles n’ont pas trouvé de relais suffisants dans la génération actuelle des 35-45 ans.
Il est difficile de déterminer dans quelle mesure la génération des femmes de 18-35 ans offre un avenir meilleur à la cause des femmes en politique.
Si on ajoute que, d’autre part, les femmes entrent certainement plus tard en politique, l’avenir ne s’annonce pas radieux. Sans parler du désintérêt et du manque de formation civique des jeunes…
3° S’ajoute au point précédent, la question de la militance féministe qui avait porté des femmes sur le devant de la scène et des revendications. Elle passe maintenant pour un phénomène rétrograde. Chez les femmes elles-mêmes souvent. A première vue, ceci est une catastrophe… et pas seulement en politique.
4° Une carrière politique, ne serait-ce de municipal-e, est un travail de longue haleine. Ainsi, à titre d’exemple, Nathalie Saugy, fraîchement élue à Yverdon, a suivi une longue carrière associative et politique avant de briguer un poste de municipale. Elle a notamment été élue à la Constituante vaudoise avant de poursuivre son cursus au sein du Conseil communal.
En général, il faut environ deux législatures au Conseil communal, voire un passage au Grand Conseil comme Fabienne Freymond Cantone (+ un passage sur la liste des candidat-e-s au Conseil national pour cette dernière), pour briguer avec de bonnes chances un tel poste.
Homme ou femme confondus d’ailleurs. Ainsi, Eric Zuger a été élu à son deuxième essai bien qu’il était déjà député lorsqu’il se présentait pour la première fois il y a quatre ans.
Comme les femmes démarrent généralement leur carrière politique plus tard que les hommes, leur parcours s’en trouve largement contrarié, car les femmes trouveront sur leur route des hommes tant de leur âge que plus jeunes au parcours équivalent. Et pas forcément prêts à laisser leur place, hein.
5° On a espéré qu’avec l’arrivée des femmes en politique, une nouvelle manière de faire et de conduire la politique serait instaurée. Il faut dire haut et fort que, concernant tout particulièrement les exécutifs, il n’en est rien.
Et les femmes qui parviennent à se faire désigner, puis élire, le font quasiment toutes à la manière des mecs. Ce qui ne manquera pas, de plus, à leur être reproché le cas échéant comme avec Véronique Pürro.
Le parcours à suivre et sa durée ne changeant pas, elles intègrent les démarches, attitudes et méthodes de leurs concurrents mâles.
Concernant les solutions pouvant être développées pour améliorer la situation à l’égard des femmes en politique, je soumets à votre sagacité les deux propositions suivantes.
La première consisterait, si ce n’est pour les conseils communaux, à imposer des quotas pour les élections aux Parlements cantonaux et pour les représentants au Conseil national. Personnellement, je ne pense pas que la situation des femmes en politique pourra s’améliorer sans des mesures de ce type. L’exemple français étant révélateur à ce sujet concernant l’Assemblée nationale.
Une des difficultés provient cependant du mode de scrutin de listes pouvant être modifiées par l’électeur. Il faudrait donc concevoir une double proportionnalité : sur les listes et en fonction du nombre de sièges obtenus. Là réside un obstacle non négligeable. Peut-être moins à gauche, car, si les femmes ont de la difficulté à figurer sur les listes, elles sont bien élues sur les listes de gauche. Ce qui n’est pas le moindre des paradoxes.
Une autre solution résiderait dans la limitation du cumul des mandats (municipal + député; municipal + conseiller national; conseiller national + député). Cette mesure pourrait limiter la durée du cursus nécessaire pour établir sa « surface » électorale. Ce qui est un des obstacles principaux à la carrière politique des femmes. Plus globalement, cette mesure favoriserait la relève.
Voilà donc relativement à l’analyse, toute personnelle, de la situation. Vos remarques et commentaires sont les bienvenus.
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