Le 3 novembre prochain, les électeurs québecois sont appelés à renouveler leurs autorités municipales. Ce scrutin est doublement sous les feux des projecteurs. Premièrement, après ces élections, le parlement québécois pourrait être dissous et des élections provinciales (régionales) être anticipées. En effet, les dernières élections de 2012 n’ont pas permis de dégager de majorité et la Province est gérée par un gouvernement minoritaire, emmené par le Parti québécois (PQ). Deuxièmement, depuis l’automne 2011, le Québec vit au rythme de la Commission Charbonneau qui enquête sur des réseaux municipaux de corruption concernant l’octroi et la gestion des contrats publics dans l’industrie de la construction (voir les dossiers du journal Le Devoir et de Radio Canada).
Deux municipalités se sont plus particulièrement retrouvées sous les feux de la Commission Charbonneau : Montréal et sa voisine Laval. En effet, depuis le mois de juin 2012 et le début des audiences publiques télédiffusées de la Commission, leurs maires, puis leurs successeurs, ont dû démissionner à la lumière des révélations faites durant ses audiences.La municipalité de Laval a même été mise sous tutelle par le gouvernement québécois. Ces deux villes partageaient également une caractéristique commune : leur maire était en fonction depuis de nombreuses années. C’est ainsi que Gérald Tremblay était maire de Montréal depuis 25 ans :
Pour sa part, maire de Laval depuis 1989, Gilles Vaillancourt, a depuis été mis en accusation pour association de malfaiteurs (9 mai 2013). Il fait face à des accusations de fraude, corruption, complot et gangstérisme. Il est même considéré comme étant le parrain de l’organisation !
http://youtu.be/jKHIgzZz51U
Sans trop de surprise, une partie de l’argent de la corruption a trouvé refuge en Suisse et au Panama :
http://youtu.be/Lx6_vS4dwX0
Dans le cadre de la campagne actuelle, sa situation de mise en examen n’empêche pas Gilles Vaillancourt de proposer ses services et de financer la campagne à des candidats à la mairie de Laval (Campagne électorale à Laval: Gilles Vaillancourt a tenté de s’ingérer | Le Devoir)
Laval est une ville jeune et qui a toujours connu des problèmes de collusion, voire de corruption. En effet, elle n’a été créée qu’en 1965. Hormis quelques îlots, Laval est presque entièrement situé sur l’île Jésus. Avec sa population estimée à 401’553 habitants en 2011, Laval est aujourd’hui la troisième ville la plus peuplée du Québec. Sa création est déjà le résultat de problèmes de collusion entre élus locaux et entrepreneurs privés. En effet, à compter de la fin des années 40, l’île Jésus commence à accueillir les premiers contingents de nouveaux résidents venant de Montréal. Ce mouvement gonfle les effectifs démographiques des paroisses rurales et les transforme durablement. Pour la seule décennie 1951-1961, la population de ce qui deviendra Chomedey passe de 7’732 habitants à 30’445, celle de Duvernay de 1’529 à 10’939, celle de Laval-des-Rapides de 4’998 à 19’227, celle de Pont-Viau de 5’129 à 16’077 et celle de Saint-Vincent de Paul de 4’372 à 11’214. En 1961, Saint-Martin, L’Abord-à-Plouffe et Renaud sont fusionnées pour constituer Chomedey. Devant les problèmes de croissance et déjà d’accointances entre promoteurs immobiliers et élus locaux, le gouvernement de Québec intervient cependant et crée, au début de 1964, une commission d’enquête sur les problèmes de l’île Jésus. Présidée par le juge Sylvestre, la commission recommande au gouvernement la fusion des 14 municipalités, ce qui est chose faite dès 1965. En 1979, le gouvernement du Québec crée les municipalités régionales de comté (villes dites MRC) et, depuis 1984, Ville et MRC se superposent avec à sa tête un maire-préfet. Ce statut n’est, semble-t-il, pas étranger aux problèmes d’associations de malfaiteurs que la ville de Laval rencontre depuis (Laval : la «baronnie» doit être démantelée | Le Devoir).
Croissance non maîtrisée, clientélisme et corruption, aujourd’hui la confusion règne à Laval après plus de deux décennies de pouvoir quasi absolu de Gilles Vaillancourt. Plus d’une demi-douzaine de candidats se sont lancés dans la course à la mairie. Les électeurs sont confus et parviennent difficilement à reconnaître les candidats et les enjeux («Un autre système» occulte à Laval | Le Devoir). Cette confusion est également le résultat d’une des particularités de élections municipales à la mode québécoises. En effet, ce ne sont pas des listes de partis bien identifiés qui s’affrontent, mais des listes locales organisées autour d’un leader et collectant des fonds au profit de ce que l’on peut appeler un conglomérat de candidats. Dans ce cadre-là, l’argent de la corruption finance en premier lieu les campagnes électorales, puis à enrichit les élus ou des fonctionnaires de l’administration municipale lors de l’attribution de contrats avec la ville.
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