Doyen de la Faculté des lettres, François Rosset propose, dans un article publié sur le site de l’Université de Lausanne, un regard différent sur la bataille qui fait rage au sujet de la réforme de l’école vaudoise.
Tout d’abord : le niveau baisse-t-il?
«Le choeur des mécontents a toujours beaucoup murmuré quand il s’est agi pour les plus anciens de constater l’ignorance et l’incurie des plus jeunes. On pourrait facilement réunir un florilège d’imprécations et de regrets formulés depuis l’Antiquité jusqu’à nos jours sur les manquements des maîtres, la dégradation des écoles, l’érosion du savoir. Il est pourtant peu probable que les propos gravitant autour de la prochaine votation sur l’école vaudoise méritent leur place dans un tel florilège, tant ils sont pauvres et inadéquats pour la plupart d’entre eux.»
Mais surtout que savent nos enfants?
«il n’est pas pertinent de poser la question : qu’est-ce que nos enfants ne savent pas ? Sans s’interroger dans l’autre sens : que savent-ils ? Ils savent une multitude de choses dont leurs grands-parents et leurs parents n’avaient même pas l’idée, et je ne parle pas ici de la simple manipulation des gadgets qui ont envahi notre quotidien.»
Et sur la question de l’orthographe?
Affirmer que l’on sauvera l’orthographe en séparant ou en réunissant les élèves relève de la naïveté ou du mensonge calculé.
Et maintenant que penser du débat scolaire actuel ? (24 Heures):
«On se focalise sur des constats comme le déficit en orthographe en faisant croire aux citoyens qu’avec tel système on va résoudre le problème. Or, ce n’est pas une loi qui permettra de combler des déficits de connaissances; une loi sert à définir une politique d’éducation et un cadre de fonctionnement, pas à établir des contenus ou à fixer des modèles pédagogiques. Le rapport d’une communauté à sa langue dépend de facteurs beaucoup plus complexes qu’un simple système scolaire. La preuve est que dans toute la francophonie, on observe les mêmes difficultés des jeunes avec la maîtrise du français alors que les systèmes scolaires y sont très différents.»
Tout ceci forme un ensemble de propos qu’on aurait souhaité entendre plutôt dans une campagne nivelée elle par le bas. Assurément.
Au final, puisqu’il ne s’agit pas de voter pour sauver l’orthographe, établir des contenus ou fixer des modèles pédagogiques, le vote de ce week-end est un choix politique
«qui aura davantage de conséquences sur le fonctionnement de la société vaudoise que sur les connaissances réellement acquises par nos enfants à l’école.»
D’un côté, nous sommes face à un projet d’école (Ecole 2010) qui stigmatise, divise et répartit les élèves dans des ordres et bâtiments scolaires distincts. De l’autre, un projet (la LEO) qui, tant bien que mal, cherche à éviter cette stigmatisation des élèves et cherche à les faire travailler ensembles. Ségrégation ou devenir commun pour les futurs citoyens vaudois ?
Source : François Rosset: «La réforme scolaire n’est pas une simple recette».
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