Pour ces deux camps, ne pas être avec eux signifie être contre eux. La croisade entre le bien et le mal se décline ainsi en une intolérance qui conduit au fascisme. Très curieusement, dès que ce mot est prononcé à leur encontre, ils prennent des poses de vierges effarouchées et crient à l’injure. Leurs prédécesseurs avaient sur ce point moins de vergogne sans pour autant que l’on puisse dire que c’était tout à leur honneur!
Avant de poursuivre avec le Courrier international. une première halte s’impose auprès de Robert Paxton, très largement connu et reconnu pour ses travaux sur le fascisme et le régime de Vichy. Dans une intervention faite en 1994 dans le cadre des Conférences Marc Bloch, Paxton observe les caractéristiques suivantes du fascisme :
• un sentiment que la communauté est victime, qui justifie tout recours contre ses ennemis, intérieurs autant qu’extérieurs;
• un pressentiment de décadence de la communauté, minée par la gauche individualiste et cosmopolite;
• comme remède à cette décadence, l’encadrement de la population en un fascio, ou faisceau, où l’unité des âmes est forgée par une conviction commune, si c’est possible, et par la force si c’est nécessaire;
• un sens de l’identité où la grandeur de la communauté vient renforcer l’identité individuelle;
• l’autorité du chef, seule structure politique capable d’incarner le destin de la communauté;
• la beauté de la violence et de la volonté, quand elles sont dévouées au succès de la communauté dans une lutte darwinienne.
[Paxton (1994). Les Fascismes. Essai d’histoire comparée.]