Hillary Clinton : «Donnez-nous cette Nation à guérir»
Un discours de présidente des Etats-Unis. Incontestablement dans la teneur. La candidate des gens modestes aussi. Elle gagne mon vote par son programme.
En une minute vingt, Hillary Clinton se pose au-dessus de la mêlée. Là, je suis impressionné. La mise en scène est parfaite. Ses partisans sont tenus à (légère) distance. Elle est visuellement la présidente plus que la candidate comme Barack Obama l’avait été dans son discours de l’Iowa.
Son calme est tout présidentiel. Dans la tourmente économique que connaît l’Amérique, elle rassure. Son discours la place en candidate du rassemblement: « Donnez nous cette Nation à guérir, ce monde à gouverner. Je sais que nous sommes prêts. »
Barack Obama : «Our time has come»
«C’est curieux cet effet “prêche”. Obama parle et les spectateurs reprennent: “Yes we can”» http://tinyurl.com/2q7yqd
Barack Obama est “collé » à ses partisans. Visuellement, il n’a pas pris la « distance présidentielle ». Il reste le candidat, il n’est pas LE président. Qui plus est on est au culte du dimanche, pas dans le bureau ovale.
D’autre part, Obama martèle depuis l’Iowa le même discours jusqu’à l’obsession. Vingt minutes de « change », « choice », « yes, we can », mais sans jamais indiquer concrètement ce qui changera et quels seront ces choix différents qu’il fera. En fait, seule sa personne incarne le changement ou le choix. C’est un discours d’évangéliste que je peine à distinguer de celui d’un candidat conservateur républicain!
Après avoir passionné l’Amérique et au-delà, Le SuperTuesday a rendu son verdict. Relativement clair du côté républicain, John McCain sort en tête, mais peine à convaincre les conservateurs à voter pour lui. Les succès inattendus de Mike «Troisième Roue» Huckabee dans les Etats du Sud l’illustrent à la perfection.
Plus disputé du côté démocrate, Hillary Clinton devrait pour la première fois virer en tête—ce serait LE tournant des primaires démocrates— au bilan des délégués en remportant tous les grands Etats, y compris le Massachusetts, fief de Ted Kennedy. Candidate hyperfavorite, ce fait ne jouait certainement pas en sa faveur en début de campagne dans des Etats ravis de jouer leur rôle de faiseurs de surprise et d’outsider. Ravis les médias l’ont certainement été tout autant pour vendre de l’info. Il lui fallait donc tenir jusqu’aux primaires dans les grands Etats. On y perçoit toute la difficulté : rappelons-nous ce qui est arrivé à Rudy Giuliani.
Aujourd’hui, elle a surtout gagné des points en remportant un de ces Etats «basculants» si importants pour l’élection générale, car elle prive Barack Obama d’un de ses arguments lui qui en a gagné deux.
Il n’en reste pas moins que la campagne démocrate verse dans l’irrationnel le plus complet avec des électeurs/trices qui jusqu’à l’urne hésitent sur le choix du candidat-e retenu. Irrationnel aussi lorsqu’on analyse que le programme le plus «libéral» (gauche) et démocrate est celui d’Hillary Clinton, mais que les «libéraux» votent Obama… Aller y comprendre quelque chose! Effet communicationnel avec des messages répétés jusqu’à l’obsession?
Dans tous les cas, Hillary Clinton recueille notamment le suffrage des gens modestes, signe qu’elle paraît avoir réussi la captation des anciens supporters de John Edwards —qui recueillerait néanmoins 8% des suffrages, selon les sondages, en Californie! Elle a aussi gagné le vote des Hispaniques, vote également très important pour l’élection générale. Reste pour elle et les démocrates, sa capacité à rassembler lors de la générale le vote des électeurs indépendants et, dans une certaine mesure, celui des jeunes de moins de 25 ans.
Indépendamment du choix final, il faut noter que l’engouement du côté démocrate se traduit très clairement au niveau de la participation. Ainsi, dans le New Jersey, la primaire démocrate a attiré quatre fois plus d’électeur qu’en 2004. Globalement, fait nouveau, les primaires démocrates attirent plus d’électeurs que les primaires républicaines. Signe de la ferveur entourant les deux candidat-e-s, mais également du désamour des électeurs républicains à l’égard du parti républicain et surtout de la politique du président Georges W. Bush.
En outre, en 2004, Howard Dean avait réussi à enthousiasmer les internautes, mais n’avait pas réussi à traduire cet engouement dans les urnes des primaires. En 2008, les enseignements de 2004 ont été retenus par les candidat-e-s, mais aussi par les électeurs/trices. Ainsi Barack Obama principalement a réussi à traduire l’engouement incontestable du net en sa faveur dans les urnes. L’augmentation de la participation des jeunes (moins de 29 ans) démontre également que cet électorat a aussi retenu la leçon que le jeu démocratique n’était pas que virtuel! Mais cet engouement profite certainement aussi à Hillary Clinton. Tous les candidat-e-s ont adapté leur campagne en y intégrant la variable du web 2.0. Certainement aussi que le SuperTuesday de 2008 a rendu d’autant plus nécessaire la variable web 2.0.
Et maintenant? A partir de quand la lutte acharnée des candidat-e-s démocrates jouera-t-elle en défaveur du candidat-e démocrate retenu-e? Comment traduire l’avantage pris dans les primaires en terme de mobilisation dans l’élection générale? Hillary Clinton repoussoir des conservateurs américains «suffirait»-t-elle à faire revenir au bercail McCain les électeurs (néo)-conservateurs et évangéliques? Les démocrates réussiront-ils à se réunir autour d’un ticket Hillary Clinton-Barack Obama? Et les deux candidat-e-s? Quand parlera-t-on programme et projets?
NB: Barack Obama serait le nouveau Kennedy. Personnellement je suis à la recherche du nouveau Roosevelt. Et Hillary est de cette veine-là!
Nouveau billet: USA2008 : Hillary au bout du suspense http://tinyurl.com/2uy7gj