Ces derniers jours les médias américains et francophones ont beaucoup parlé du spot d’Hillary Clinton axant sa campagne sur la peur et s’inspirant très largement des deux campagnes présidentiels de Georges W. Bush. Je parle bien entendu de la vidéo « Kitchen »:
André Gunthert (Elire un président de cinéma?) la présente très bien:
Après la vidéo « Children (it’s three AM) », le staff de Hillary Clinton a encore grimpé d’un cran dans l’échelle du clip politique qui fait peur. Diffusé le 21 avril, la veille du vote des délégués de Pennsylvanie, « Kitchen » (allusion à une citation de Harry Truman: “If you can’t stand the heat, get out of the kitchen”; “Si tu ne supportes pas la chaleur, ne reste pas dans la cuisine”) accumule images de guerre et de pompes à essence dans le plus grand désordre mental, sur une musique façon « L’Etoffe des héros ». On croirait une annonce pour un programme de Fox News.
Elle n’honore certes pas Hillary Clinton. Dans le même temps, si Obama ne s’en sort pas face à ce type de campagne négative, il n’aura aucune chance en novembre. En même temps, s’il se sort bien de ce type d’attaques dans les primaires démocrates, il privera de munitions les Républicains puisqu’il pourra toujours parler de réchauffé…
Pour comprendre le principe des publicités négatives utilisée dans les campagnes américaines, la démarche parodique de l’équipe de Slate est également éclairante (Attacking Barack With the Boss) pour que nous puissions imaginer ce qui attend Barack Obama ces prochaines semaines et prochains mois. A cela s’ajoute la particularité et les possibilités offertes par le multimédia à la portée de tous et l’utilisation d’un réseau comme YouTube dans le genre de publicité «virale». Cette vidéo parodique* associe donc de manière particulière Bruce Springsteen et Barack Obama. En effet, le Boss a adoubé dernièrement Barack Obama lors de la campagne de Pennsylvanie, via une lettre de soutien de Springsteen publiée sur son site.
La publicité réalisée par Slate décline le thème de campagne apparu après les propos pour le moins ambigus de Barack Obama depuis San Francisco à l’égard de la classe moyenne américaine. La présentation de Slate:
Bruce Springsteen has come out for Barack Obama. You might think the working-class rocker’s endorsement is the perfect tonic for those « bitter » fumes engulfing Obama, following his recent ill-chosen remarks about small-town America. Certainly the timing seems great, with a critical primary in blue-collar Pennsylvania just days away.
Or, if you’re Hillary Clinton, you might try to turn the Boss’ show of support for Obama into a big fat negative. Slate V imagines what the attack might look like.
Dans le clip, des extraits de chanson de Bruce Springsteen sont repris. Sortis de leur contexte, ceux-ci donnent à penser que The Boss aurait les mêmes préjugés négatifs que B. Obama et ne serait en plus que le défenseur d’une Amérique de loosers. Le syllogisme sous-entendu est assez clair : si le Boss ne soutien que des loosers alors Barack Obama est un looser. Les deux font fausse route.
Dans l’histoire, le pire réside dans le fait que, sortie du site et du contexte de présentation de Slate, très peu de chose la distingue d’une publicité de campagne, réalisée et payée par un groupe de soutien à Hillary Clinton.** La confusion est donc totale. Et là elle dessert les deux candidats au plus grand profit des Républicains.
Décidément « It’s a brave new world ».***
* mais pas autant que cela, car sortie de son contexte et publiée sans précaution sur un blog, on jurait effectivement une publicité de campagne diffusée par un comité de soutien à Hillary Clinton.
** Seul le portrait de Céline Dion insinue un certain doute, mais comme c’est une de ses chansons qui est une des chansons présidant aux meetings d’Hillary Clinton…
*** Titre anglais du livre d’Aldous Huxley, Le meilleur des mondes.